U CANTU DI I CANTI - Norbert PAGANELLI - 2014

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 Préface

J’avais, il y a quelques années, entrepris la lecture de la Bible puisque « le livre des livres » est considéré comme la pierre d’achoppement des trois grandes religions monothéistes et que celles-ci, que l’on soit croyant, athée ou agnostique irriguent, par capillarité la civilisation qui est la nôtre.

Hormis les versets que je connaissais déjà plus ou moins et que j’appréciais, qu’il s’agisse de la Genèse ou duLivre des rois, cette lecture me fut difficile et ne suscita en moi qu’un faible enthousiasme. La révélation surgit en découvrant le Cantique des cantiques que je ne connaissais que de nom.

Comment expliquer la véritable magie de ce poème inséré au cœur de l’Ancien testament et qui présente, sous une forme dialoguée, les amours champêtres de la Sulamite[1]et de son compagnon ?

Il n’est pas improbable que le texte, par sa candeur et sa naïve fraicheur, alors que l’ensemble du corpus au sein duquel il figure est à dominante inquiétante et sombre, bénéficie ainsi d’une mise en lumière accentuant son charme. Il n’en demeure pas moins que ceux qui ne connaissent que le seul Cantique des cantiques partageront également, très probablement, cette appréciation.

Doit-on rechercher l’origine de cette fascination dans le simple fait que le texte, dont la datation exacte ne fait pas l’unanimité mais remonte à plusieurs siècles[2] avant Jésus-Christ, nous parle de l’amour comme pourraient en parler troubadours et romantiques, suggérant ainsi une sorte d’invariance du phénomène à travers les siècles ? C’est également possible même si, incontestablement, certaines paroles, certaines comparaisons nous font aujourd’hui un peu sourire. Faut-il admettre, comme le proposent certaines lectures savantes d’inspiration cléricales, que le pouvoir de séduction du texte provient du fait que sous l’apparence de l’amour humain c’est d’un autre amour dont il est question (celui de l’amour de Dieu pour son peuple) ? Peut-être, mais jamais les constructions métaphoriques n’ont suffi, à elles-seules, à insuffler aux écrits le charme mystérieux de la séduction.

Comportant de nombreuses redites, organisé autour d’une structure parfois déroutante, ayant recours à des images quelque peu obsolètes, en dépit et peut-être en raison de tout ceci,  le texte nous fascine comme il a fasciné plusieurs générations de lecteurs.

Après avoir travaillé sur plusieurs traductions, je me suis arrêté sur celle de Louis Segond[3], effectuée à partir des versions grecques et hébraïques, parce qu’elle me semblait d’une plus grande clarté dans le mode de présentation des différents intervenants, lesquels sont clairement mentionnés. Ce n’est pas toujours le cas d’autres traductions et je l’ai regretté.

De suite, l’idée de traduire en langue corse, ce texte des origines, s’est imposée à moi. J’ai, bien-sûr, pris connaissance de la remarquable traduction de la Sainte Bible effectuée par Christian Dubois[4] mais j’ai également souhaité suivre mon propre chemin en privilégiant quelques tournures et  expressions du sud-insulaire et en adoptant systématiquement les articles longs (lu et la à la place de u et de a) afin de restituer au texte son emphase lyrique.

J’ai, à plusieurs reprises, eu l’occasion de lire en public certains extraits de cette œuvre durant les Escales poétiques organisées avec mon ami Henry Dayssol, un peu partout en Corse. J’ai pu constater combien la beauté de ce texte biblique pouvait séduire un auditoire contemporain.

Si, par cette traduction, je puis contribuer à mieux faire connaître, en cette terre tourmentée, la richesse de ce chant d’amour et de paix venu du fond des âges, j’aurai réussi ma mission de passeur.


[1]  Sulamite : originaire du village de Sulam ? Forme féminine de Salomon ? En lien avec « shalom » (la paix)?

[2] Pour certains, le texte remonterait à l’époque du roi Salomon (970 /931 av J.C)  ou aurait été rédigé par lui, pour d’autres, il daterait du V° siècle av J.C.

[3]  Louis Segond (1810/1885) : pasteur genevois dont la traduction de la Bible fit longtemps autorité.

[4] La sainte Bible : traduction en langue corse, DCL éditeur, 2005.

Illustrations de Dominique Casaux

Date de dernière mise à jour : 26/06/2022

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